Mercedes AMG GT XX : records, charge à 850 kW et bascule électrique affirmée

Le coup de tonnerre AMG

Un marathon électrique de 40 075 km

Ce n’est pas un concept-car figé dans un salon.
C’est une voiture qui a roulé. Beaucoup.

Sur l’anneau de vitesse de Nardò, en Italie, Mercedes-AMG a aligné un prototype électrique, baptisé AMG GT XX Concept, pour battre tous les records de distance jamais enregistrés sur un véhicule électrique.
Objectif : parcourir l’équivalent de la circonférence terrestre (40 075) km en moins de huit jours.
Résultat : 7 jours, 13 heures, 24 minutes et 7 secondes.

En chemin, le prototype a pulvérisé 25 records d’endurance successifs, couvrant toutes les durées de référence : 12h, 24h, 48h, 72h… jusqu’à 168h.

Le record journalier le plus marquant ? 
3 405 miles (5 480 km) en 24h, soit près de 230 km/h de moyenne sur une journée entière. Arrêts compris !

Pas (seulement) une opération marketing.
Une performance industrielle.

Trois moteurs, une orgie technologique

Sous la carrosserie, un arsenal technologique impressionnant :

• Trois moteurs axial-flux (rendement élevé, densité record, faible inertie)
• Puissance combinée : 1 360 ch environ
• Architecture électrique 800 V, permettant de réduire les pertes et d’optimiser les temps de charge
• Batterie composée de cellules cylindriques NCMA, avec refroidissement liquide diélectrique direct, une technologie empruntée au sport automobile et adaptée ici à un usage d’endurance
• Refroidissement également appliqué aux moteurs : indispensable pour maintenir les performances sur plusieurs milliers de kilomètres à vitesse soutenue

Chaque choix technique vise la stabilité thermique, l’efficacité énergétique et la résilience en usage extrême.

Une charge qui dépasse tout : 850 kW

C’est peut-être là le vrai choc.

Le Concept AMG GT XX est capable de supporter une puissance de recharge de 850 kW. Soit plus du double des bornes publiques les plus puissantes actuellement disponibles (Tesla V4 ou Alpitronic = 350–400 kW).

Concrètement :

• 400 km récupérés en 5 minutes
• Température, tension et refroidissement maîtrisés à la seconde près
• Infrastructure de recharge spécifique, non disponible dans le réseau public
• Objectif à long terme : 10 000 stations 850 kW déployées à l’échelle mondiale d’ici 2035, selon Mercedes-AMG

C’est une charge qui dépasse la technique : c’est un marqueur de statut.

Mercedes-AMG n’a pas développé seule cette infrastructure. C’est le fabricant italien Alpitronic, déjà connu pour ses superchargeurs Hypercharger, qui a conçu le système de recharge à 850 kW, en étroite collaboration avec les équipes d’Affalterbach.

Le défi : concevoir une borne capable de délivrer une puissance stable et continue à ce niveau extrême, tout en maintenant un haut niveau de sécurité, de rendement, et de contrôle thermique.
Alpitronic a donc développé une architecture modulaire spécifique, à refroidissement liquide, intégrant de nouvelles normes de transmission de puissance.

C’est une première mondiale dans le domaine de la recharge ultra-rapide, qui place Alpitronic au rang de fournisseur stratégique pour le haut de gamme électrique.

Une vitrine vers AMG.EA

Le GT XX Concept n’est pas un prototype sans lendemain. Il préfigure une plateforme dédiée, baptisée AMG.EA, sur laquelle reposera dès 2026 la future AMG C590.

Cette nouvelle gamme 100 % électrique veut offrir :

• La performance AMG
• L’endurance AMG
• Le son AMG (recréé numériquement, bien sûr)

Michael Schiebe, CEO de Mercedes-AMG, résume : « Ce n’est pas une AMG électrifiée, c’est une AMG née électrique. »

Ce que cela change

AMG propose la rupture

En un seul projet, AMG enterre le thermique. Pas de transition douce. Pas de V8 hybride rechargeable.

La marque sportive de Mercedes prend le virage électrique à pleine vitesse, en redéfinissant ses codes : plus question d’émotion mécanique ou d’explosions contrôlées, mais d’endurance, de puissance instantanée, de maîtrise énergétique.

C’est la première marque premium à revendiquer une rupture aussi nette, sans s’excuser de tourner la page.

La recharge devient un argument statutaire

Dans le premium électrique, la recharge est désormais un critère de différenciation.

• Tesla a normalisé le 250–300 kW
• Lucid flirte avec les 350–400 kW
• Nio change carrément la batterie

AMG répond : 850 kW, et alors ?

La puissance de charge devient un attribut symbolique. Une manière de dire : « Je n’ai même pas besoin d’attendre« .

Reste à savoir si ce standard peut s’imposer, ou s’il restera un privilège de marque, comme la recharge Porsche sur bornes Ionity Premium.

L’endurance comme nouveau totem

L’automobile de performance s’est longtemps définie par le 0 à 100 km/h.

AMG propose autre chose : la performance qui dure, les 40 000 kilomètres avalés sans rupture, les 300 km/h maintenus sans flancher.

Une sorte de retour aux fondamentaux du sport automobile d’endurance (Le Mans, Spa, Nürburgring), appliqués à l’électrique.

C’est un virage culturel : on ne vend plus une accélération, on vend un marathon.

Le coût de l’élitisme

Aucun doute : cette technologie ne sera ni standard, ni bon marché.

Un système tri-moteur axial-flux, refroidi individuellement, avec cellules NCMA haute performance et charge à 850 kW, coûtera cher à produire, à entretenir, et à intégrer dans une chaîne logistique.

La promesse : faire rêver, et tirer les standards vers le haut (comme le 800 V ou le refroidissement liquide, aujourd’hui en cours de diffusion).

Mais aussi le risque : créer un écosystème fermé, réservé à une minorité ultra‑privilégiée.

Conclusion

Le Mercedes AMG GT XX Concept n’est pas qu’un monstre de technologie. C’est une déclaration stratégique, un manifeste.

Il affirme qu’on peut :

• construire une voiture électrique qui bat tous les records,
• rouler pendant une semaine sans faiblir,
• charger en 5 minutes et repartir comme si de rien n’était,
• et que tout cela n’est pas une alternative, mais la nouvelle norme du luxe et de la performance.

Une page se tourne. Elle ne sent plus l’essence. Mais elle grésille à 850 kW.

Léon

Léon Chelli arpente les mondes de l’automobile et des énergies renouvelables à travers la transition écologique. Il y déchiffre mutations industrielles et stratégies de marché avec la lucidité un peu sauvage d’un promeneur qui choisit ses propres sentiers.
Il explore les transitions avec une vision systémique, entre ironie assumée et clarté analytique.